LE SONGEUR EN CHIMERIE

LE SONGEUR EN CHIMERIE

SOUVENIRS : TON PARFUM

C'est en prenant l'ascenseur que j'ai senti ton parfum, il était rempliC'est en prenant l'ascenseur que j'ai senti ton parfum, il était rempli de toi. J'ai ouvert la porte et je suis entré en toi, encore une fois, une dernière fois. Et j'ai entendu les oiseaux chanter dans leurs petites cages de joncs. Nous glissions au fil de l'eau, à travers les klongs étroits du marché flottant de Damnoen Saduak. Nous croisions de nombreux bateaux chargés de bananes vertes, de liserons d'eau, de kaffirs et d'autres fruits et légumes aux multiples couleurs. On s'arrêtait pour manger des crêpes de riz dans des feuilles de bananier que nous préparait une vieille cuisinière. Tu riais alors qu'elle farcissait ses crêpes de viandes laquées, de boulettes de poisson, ou de crevettes séchées, ponctuant chaque portion d'un "Very good, very good".

 

L'après-midi, tu avais eu la peur de ta vie en visitant un boulanger de Ratchaburi qui prépare des pains en forme de membres humains et de têtes coupées tellement réalistes. Tu avais appris en Thaï à dire "Ne pas croire ce que l'on voit" et d'un seul coup tu rayonnais comme si toute la philosophie bouddhiste venait de t'imprégner. Je te regardais illuminer les rues du vieux Bangkok avec un petit sourire amoureux au coin des lèvres, tu te faufilais en robe légère entre les tuk-tuk qui nous interpellaient voyant en nous des "farangs" aux coeurs amoureux et au portefeuille plein de Bahts...

 

Nous avions voulu toucher le ciel en montant au 83ème étage de la tour Bayoke pour y boire un Maï Taï servi par des serveuses souriantes. Sur la passerelle, à plus de 300 mètres au dessus de la ville tentaculaire, tu me faisais un remake de Titanic embrassant le monde de ta soif de découvertes. Je ne savais pas alors quel naufrage m'attendait.

 

Bien sûr, tu avais voulu voir Patpong et ses mirages sexuels, une plongée dans un enfer pour touristes en mal de sensations où je me sentais mal à l'aise. Tu avais dansé sur une piste pour hôtesses, te frottant à une barre pour me faire un grand numéro de charme qui faisait passer les filles du bar pour des amatrices, trop blasées d'être regardées par des Américains saouls. Tes longs cheveux collés par la sueur dessinaient des rivières sombres sur ta poitrine bronzée, j'y voyais des racines d'arbres, des volutes ténébreuses, des serpents de mer, mon esprit pas mal embrumé par un mauvais alcool.

 

De retour à notre table, reprenant ton souffle, tes dents si blanches avides de croquer la vie, tu m'avais dit "J'adore ça.. Je ne veux plus jamais rentrer, j'ai si soif de découvrir le monde!". J'avais alors vu passer une ombre sur ton visage quand je t'avais dit que notre vie n'était pas ici, qu'il faudrait faire les bagages bientôt, qu'il y avait mon travail..

Parfois j'avais l'impression que tu étais un animal sauvage. L'impression de tenir une mouche dans ma main fermée, si prête à s'échapper.

 

Le soir, dans un petit restaurant, j'avais glissé ma main entre tes cuisses, doucement visitant de mes doigts ton intimité trempée. Nous faisions semblant de rien mais la rougeur de tes joues trahissait ton émoi. Je me souviens du serveur venu t'apporter un grand verre de kafae yen glacé en te demandant "Too spicy?" à qui tu avais répondu "Nooo! Too hot!!" en essayant de réprimer ton plaisir.

 

Après nos colorées salades de mangues vertes, j'avais cassé un "fortune cookie" dans lequel j'avais trouvé ce proverbe: "Il faut toujours laisser la cage ouverte pour le retour de l'oiseau." et dans le tien il y avait: "L'eau renversée est difficile à rattraper.", à ce moment-là, difficile de croire que ces proverbes parlaient de nous.

De retour dans notre chambre, nos corps projetaient sur le mur blanc les ombres de nos amours tel un spectacle Nang Yai indécent, le film de minuit de nos corps exaltés. Dans un souffle de plaisir tu m'avais murmuré à l'oreille: "Ne me laisse pas t'oublier...". Je n'avais pas compris.

 

Cette nuit là, n'arrivant pas à trouver le sommeil, nous avions déposé une bougie dans une fleur de lotus qui avait emporté sur le fleuve tous nos espoirs et nos rêves. Les petites flammes disparaissant peu à peu dans la nuit, je repensais à mon voeu, celui que tu me fasses un enfant. Je n'ai jamais su le tien, car le lendemain ta place était vide dans le grand lit.

 

Mais elle ne le sera jamais dans mon coeur...

 

Je te cherche toujours Night Bird....

 

LeSongeur 2009 +

 

(Le texte sur Auféminin.com...)



11/02/2010
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